(Hespress.com) – Cette formule avait déjà été galvaudée après les récentes élections législatives. Les efforts du président Emmanuel Macron, après une longue période de recherche et d’investigation, ont été couronnés par le choix de Michel Barnier. Trois mois plus tard, voilà Macron lancé encore une fois, et avec un désespoir et une gravité encore plus lourds, dans la recherche d’un nouveau Premier ministre.
Cette fois ci, non seulement la palette des choix est plus réduite mais les enjeux sont plus grands et les équations plus complexes. Emmanuel Macron cherche une personnalité capable d’être soutenue par une majorité au parlement et de résister à une probable motion de censure concoctée par la nouvelle alliance politique hors norme entre l’icône de l’extrême droite, Marine Le Pen et le parrain de la gauche radicale, Jean Luc Mélenchon.
Emmanuel Macron doit choisir une personnalité qui posséderait une recette secrète capable de produire une alchimie politique entre des forces politiques qui ne peuvent s’entendre entre elles. Le préambule de cette démarche pour Emmanuel est de réussir l’exploit de provoquer un schisme au sein du nouveau Front de gauche.
Concrètement, il s’agit de détruire le lien qui lie socialistes, communistes et verts avec la France insoumise. Et il existe de nombreux indicateurs qui renseignent les Français sur la possibilité que ce divorce puisse réussir. Un des plus forts signaux est le nouveau positionnement du Parti socialiste qui ne s’accroche plus à la candidature de Lucie Castest transformée par la France insoumise en totem sacré. Le fait que les socialistes ne la considèrent plus comme tel est un indicateur de divergences entre les composantes de cette alliance de gauche qui peuvent aller jusqu’à son démantèlement. Ce dont rêve aujourd’hui presque à haute voix Emmanuel Macron.
Le Président de la République sait que la charge lancée contre le gouvernement Barnier ne visait pas uniquement à faire tomber le Premier ministre. Son objectif principal était de le pousser à la démission en créant les conditions d’une crise de régime inédite qui n’aura pour seule sortie que des présidentielles anticipées.
Pour atteindre cet objectif, il y eu une convergence inédite d’intérêts entre l’extrême droite et la gauche radicale. L’agenda politique de Marine Le Pen a été violemment bousculé par le réquisitoire de la justice contre elle, la menaçant de peine d’inéligibilité avec exécution provisoire.
Quant à Jean Luc Mélenchon, depuis la dernière présidentielle où il avait perdu la seconde place à cause de quelques centaines de milliers de voix manquantes, il était comme un cheval avec toute sa fougue, coincé dans son étable, impatient d’en découdre et de prendre sa revanche. Et quand Emmanuel Macron avait refusé de charger une personnalité de gauche de former un gouvernement après les dernières législatives, Jean Luc Mélenchon avait considéré ce choix comme un hold-up et une négation de la victoire de la gauche.
A cette démarche qui vise à l’obliger de quitter l’Elysée, Emmanuel Macron avait répondu par un non tranchant et définitif. Non il ne quittera pas l’Elysée. Oui il fera tout pour former un gouvernement de l’arc républicain d’où sont automatiquement exclus Marine Le Pen du Rassemblement National et Jean Luc Mélenchon de la France insoumise.
Ce pari de Macron est dangereux car il excite cette opposition radicale qui ne reculera devant rien pour faire tomber le prochain gouvernement, quelle que soit sa couleur politique. Pour Le Pen et Mélenchon, la multiplicité des censures et des chutes de gouvernements sont la meilleure preuve de cette crise de régime refusée par Macron et qui va l’obliger, aux yeux de l’opinion, d’en assumer personnellement les dessous et d’en tirer les conséquences en se remettant en cause.
Face à ce qui peut s’apparenter à une guérilla politique, Emmanuel Macron aura à tenir six mois, jusqu’au mois de juin prochain date à laquelle il va reprendre son droit constitutionnel de dissoudre l’Assemblée et d’appeler à des législatives anticipées. En attendant cette date, la France est susceptible de vivre une période d’instabilité dont la cinquième république avait perdu le goût et le danger. Le tout, avec une grande épée de Damoclès pendue sur le locataire de l’Élysée dont la démission pourrait être la seule clef de voûte pour désamorcer cette crise française.
Hespress.com